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Niches fiscales : Philippe Crevel décrypte leur coût, leur utilité… et leurs excès

Philippe Crevel, économiste et fondateur du , passe au crible le . Avec un coût annuel de , ces dérogations soulèvent des questions cruciales sur l’efficacité de notre fiscalité. Alors que la relance l’économie européenne, quels enseignements la France peut-elle en tirer ? Son analyse exclusive pour CrediPro.

L’imagination fiscale est sans borne. Depuis des décennies, la France rivalise d’ingéniosité pour inventer, affiner, multiplier les prélèvements. Maurice Lauré, haut fonctionnaire visionnaire, fut à l’origine de la TVA en 1954, un impôt qui a depuis conquis la planète. Mais ce chef-d’œuvre a ouvert la voie à une surenchère permanente, au point qu’aujourd’hui, l’Hexagone compte plus d’impôts, de taxes, de contributions et de cotisations que de jours dans l’année ou de fromages : environ 400 en tout.

Les Français aiment la progressivité, cette promesse républicaine d’égalité devant l’impôt, mais à condition qu’elle ne s’applique qu’aux autres. La taxe Zucman, l’idée fiscale du moment, répond à ce besoin de montrer du doigt les riches, avec l’idée qu’ils peuvent à eux seuls payer pour tous les autres. C’est ainsi que les 10 % des ménages les plus aisés acquittent 75 % de l’impôt sur le revenu, et que les 0,5 % les plus riches en paient, à eux seuls, 30 %. Pour atténuer la forte progressivité des impôts, le législateur a multiplié les dérogations. Ainsi sont nées les niches fiscales, ces brèches ouvertes dans le mur de l’impôt, transformées en puits sans fond. Chaque année, le projet de loi de finances en dresse l’inventaire, tel un catalogue de la créativité fiscale nationale. En 2024, le tome II des Voies et Moyens en recensait pas moins de 466, pour un coût total de 95 milliards d’euros, soit 3,5 % du PIB. À elles seules, elles équivalent à plus d’une année de dépenses d’enseignement supérieur et de recherche. Derrière ce chiffre vertigineux se cache une répartition révélatrice : environ 190 niches pour l’impôt sur le revenu, soit une perte de recettes de près de 20 milliards d’euros ; 80 pour l’impôt sur les sociétés, représentant 15 milliards d’euros ; 60 pour la TVA, dont le coût atteint 45 milliards d’euros ; et 130 liées aux impôts locaux et divers, pour une perte d’environ 15 milliards d’euros.

Niches fiscales : comment la France a construit un labyrinthe d’exceptions

Ce système est-il inefficace ? Pas nécessairement. Les niches fiscales ne sont pas qu’un cadeau : elles traduisent des choix politiques et sociaux, qu’il s’agisse de soutenir l’innovation, d’encourager l’emploi à domicile, d’aider les associations ou de préserver le pouvoir d’achat alimentaire. Mais leur accumulation, leur empilement sans cohérence d’ensemble, donne l’image d’une fiscalité française devenue un véritable maquis corse, une usine à gaz, où la lisibilité se perd et où l’équité finit par s’éroder. La suppression des niches fiscales est annoncée chaque année pour être aussitôt abandonnée, car, c’est bien connu, dans la niche se cache un chien méchant… Il est plus facile de créer un nouvel impôt que de réformer ceux qui existent. La France se passionne pour le concours Lépine fiscal, au risque d’en oublier la simplicité et la stabilité, deux vertus pourtant indispensables pour restaurer la confiance des contribuables et renforcer l’attractivité du pays. À force de multiplier les exceptions, on finit par diluer la règle. Le principe du gagnant-gagnant devrait être appliqué : toute suppression d’une niche fiscale devrait donner lieu à un partage des gains entre l’État et les contribuables, afin d’éviter une cristallisation des oppositions.

Philippe CREVEL

Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite.

FAQ — Niches fiscales en France : 5 réponses clés sur leur coût, leur utilité et leurs paradoxes

Pourquoi la France compte-t-elle autant de niches fiscales ?

Les niches fiscales sont le résultat de , visant à soutenir des secteurs spécifiques (innovation, emploi à domicile, associations, etc.) ou à préserver le pouvoir d’achat. Leur accumulation reflète une fiscalité complexe, souvent ajustée pour répondre à des enjeux ponctuels, mais qui finit par nuire à la lisibilité et à l’équité du système.

Combien coûtent les niches fiscales à l’État chaque année ?

En 2024, le coût total des niches fiscales était estimé à 95 milliards d’euros, soit . Ce montant équivaut à plus d’une année de dépenses pour l’enseignement supérieur et la recherche.

Quel impact a la baisse des taux de la BCE ?
  • Impôt sur le revenu : 190 niches (20 milliards d’euros de perte de recettes).
  • Impôt sur les sociétés : 80 niches (15 milliards d’euros).
  • TVA : 60 niches ().
  • Impôts locaux et divers : 130 niches (15 milliards d’euros).
Les niches fiscales sont-elles efficaces ?

Elles peuvent l’être si elles répondent à des objectifs clairs (soutien à l’emploi, innovation, etc.). Cependant, leur empilement sans cohérence globale rend le système opaque et inefficace, au point de ressembler à un « » fiscal.

Pourquoi est-il si difficile de supprimer les niches fiscales ?

Chaque niche bénéficie à un groupe d’intérêts (particuliers, entreprises, secteurs économiques). Leur suppression est politiquement risquée, car elle peut provoquer des oppositions fortes. Une solution serait d’appliquer un principe de entre l’État et les contribuables, pour faciliter les réformes.

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