La création de richesse, honnie par certains, suspecte pour d’autres, est pourtant la clé de voûte de l’économie contemporaine. Depuis le milieu du XVIIIe siècle, elle est le moteur de la croissance et de l’amélioration des conditions de vie. Lorsqu’elle vient à manquer, les problèmes de financement se multiplient… La création de richesse trouve sa source chez l’entrepreneur, qui est, selon l’économiste Joseph Schumpeter, « l’agent du changement ». Ce dernier, en bousculant l’ordre établi et en innovant, est un véritable révolutionnaire. L’association du capital, du travail et du progrès technique qu’il réalise, par son caractère explosif, génère des gains de productivité, des emplois, ainsi qu’une offre et une demande accrues. Cette alchimie n’en finit pas de surprendre. L’économie repose sur la fameuse mécanique de la destruction créatrice : les anciennes activités cèdent leur place à de nouvelles, plus rentables. Toute entrave à ce remplacement permanent, parfois difficile à accepter, freine l’expansion.
De tout temps, les révolutions technologiques ont suscité des craintes. Au début du XIXe siècle, au Royaume-Uni, des artisans et des ouvriers qualifiés, appelés les Luddites, brisèrent des machines à tisser, accusées de supprimer leur emploi et de les plonger dans la précarité. Aujourd’hui, l’intelligence artificielle (IA) alimente de nouvelles angoisses. Certaines activités, tout comme des millions d’emplois, pourraient disparaître avec son déploiement. Le recours à des outils permettant de traiter un grand nombre de données, de générer du contenu ainsi que des solutions, modifiera sans nul doute les méthodes de travail et rendra obsolètes certains métiers, comme ce fut le cas lors des précédentes révolutions technologiques. En contrepartie, l’IA offrira des gains de productivité qui nous manquent cruellement. Elle génère déjà des activités et des entreprises nouvelles. Plus rapide sera sa diffusion, plus le pouvoir de création sera démultiplié. Sa simplicité d’utilisation accélère son adoption, d’autant plus que l’informatisation et la connexion à Internet sont quasi totales dans de nombreux pays. Les mutations technologiques ont toujours été bénéfiques pour l’économie et les populations, bien que leur adoption puisse être douloureuse à court terme.
L’IA et l’entrepreneuriat : la France en première ligne
Au-delà de l’antienne du déclinisme, la France compte de nombreux acteurs reconnus, en particulier dans le domaine de l’intelligence artificielle. Trois exemples illustrent le rôle de l’entrepreneuriat français dans la sphère de l’IA. Arthur Mensch, cofondateur et président de Mistral AI, est devenu le symbole d’une nouvelle génération d’entrepreneurs. Mistral AI a levé plus d’un milliard d’euros en trois tours de financement, atteignant une valorisation de près de six milliards d’euros en juin 2024. L’entreprise développe des modèles de langage open source et propriétaires, contribuant ainsi à positionner l’Europe sur la scène mondiale de l’IA. Son robot conversationnel, Le Chat, rivalise avec ChatGPT. Clément Delangue, cofondateur de Hugging Face, a développé une plateforme open source dédiée au développement et au partage de modèles d’IA. Son entreprise, valorisée à 4,2 milliards d’euros, est reconnue pour son engagement en faveur d’une IA éthique. Enfin, Mehdi Chouiten, cofondateur et président de Datategy, développe des solutions d’IA pour les entreprises. Sa société est présente en Europe, aux États-Unis et au Moyen-Orient. La France est devenue la première destination européenne pour les investissements étrangers dans l’IA. En février dernier, 109 milliards d’euros d’investissements supplémentaires ont été annoncés par le Président de la République pour renforcer ce secteur de pointe.
La stagnation n’est pas une fatalité, comme le prouvent l’Espagne, la Grèce ou le Portugal. Ces pays qui ont connu une crise sans précédent au début des années 2010 – la Grèce étant même au bord de la banqueroute – connaissent depuis quelques années un réel rebond. La croissance de l’Espagne atteint même 3 %. Le Portugal est en situation d’excédent budgétaire. Ces pays doivent leur succès à leurs entrepreneurs, qui ont su exploiter au mieux leurs atouts. Ils ont valorisé leur savoir-faire dans le tourisme, l’agroalimentaire ou encore l’énergie. Les entrepreneurs français ne manquent pas de talent et ont les moyens, par leurs idées et leurs innovations, de bâtir la croissance de demain.
Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite.
FAQ : la création de richesse et l’impact de l’intelligence artificielle
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